dimanche 27 mai 2012

L’œil du léopard, Henning MANKELL, Seuil, 2012, 343 p.



                             Roman psychologique et social

Ce n’est pas l’auteur de polars suédois que l’on retrouve ici mais un Mankell social et humaniste. A travers le destin d’Hans Olafson, enfant, adolescent et jeune adulte dans la Suède du nord et adulte dans une Zambie post-coloniale, c’est le portrait d’une Afrique noire de 1969 à 1988 où la cohabitation entre le Blanc et le Noir semble bien impossible.  Cette vision réaliste sans doute et sans concession pour les uns comme pour les autres interpelle le lecteur et le force à réfléchir sur la confrontation des deux cultures et son constat est implacable : « L’homme blanc n’a jamais compris l’Afrique ! ». Comme on le sait, Mankell partage sa vie entre Suède et Mozambique et on peut penser qu’il connaît bien cette partie africaine. Publié en 1990 en Suède, il sortira en 2012 ans chez nous : c’est donc une image de l’Afrique de voilà 22 ans et depuis, on peut penser que les choses et les mentalités ont sans doute évolué. C’est un roman dur, difficile mais tellement fort. 
                                                                                                                    Citations…

 - Un empire qu’on construit sur la base la plus fragile, à savoir sur l’oppression et l’aliénation, est une construction destinée à s’effondrer avant même d’être achevée. (p.129)
 - (C’est un journaliste noir qui parle) Un passé de colonisation prolongée a libéré les Africains de toute illusion. Ils connaissent l’inconstance des Blancs, leur tendance à remplacer une idée par une autre, en exigeant en plus que l’homme noir se montre enthousiaste. L’homme blanc travaille beaucoup et vite alors que l’homme noir associe l’urgence et l’impatience à un manque d’intelligence. Pour l’homme noir, la sagesse, c’est de réfléchir longuement et minutieusement… (p.163)

- (Le même journaliste noir) Tu es mon ami, dit-il. Du moins pour l’instant. Mais il est évident que mon souhait est que tous les Blancs quittent le pays. Je ne suis pas raciste, je ne parle pas de la couleur de la peau. Je vois la violence comme une nécessité, un prolongement de la douleur de mon peuple. Il n’y a pas d’autre issue. En Afrique, les révolutions sont la plupart du temps d’épouvantables bains de sang. Le combat politique est toujours assombri par notre passé et par nos traditions. Si notre désespoir est suffisamment grand, nous pouvons nous unir contre un ennemi commun pour, juste après, diriger nos armes contre nos frères, s’ils n’appartiennent pas à la même tribu que nous. L’Afrique est un animal blessé. (p.247)

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