dimanche 29 avril 2012

PAVLOFF, Franck, L’homme à la carrure d’ours, Albin Michel, 2012, 203 p.



        Tableau noir sur fond blanc !

Kolya à la carrure d’ours, d’origine lapone, se retrouve coincé dans cette partie désolée du Grand Nord. Le grand Trust minier a fermé ses portes il y a trente ans, bouchant les puits, détruisant tout le matériel et oubliant les hommes. Lyouba est la seule jeune femme à y être née et elle va tenter, comme Kolya de s’échapper de la « Zone » et d’affronter l’inconnu. « Les barbelés ne sont pas qu’aux frontières de la Zone, ils compartimentent le cœur des reclus et s’infiltrent entre les communautés qui se cloîtrent dans leur espace de vie » (p. 18) Dans ce décor arctique, glacial et irradié, où seul l’espoir fait vivre, Pavloff raconte la vie de ces exclus du monde dans une langue tantôt âpre et rude et tantôt poignante et poétique.
(Lire ou relire « Matin brun » chez Cheyne, 1999)

vendredi 27 avril 2012

MURAKAMI, Haruki, 1Q84, Livre 3, Octobre-Décembre, Belfond, 2012, 530 p.



                                
Après avoir lu les deux premiers livres de « 1Q84 » avec beaucoup de plaisir, tant ils m’avaient charmé, c’est avec impatience que j’ai entamé le troisième. Ce dernier tome est écrit à trois voix : celle de Tengo, celle de Aomamé et celle de Ushikawa, personnage qu’on avait rencontré dans le second, ex-avocat véreux devenu une espèce de privé. A travers leurs voix, on retrouve également Eriko Fugada, alias Fukaéri, co-auteure avec Tengo de « La chrysalide de l’air » ; Tamaru, le serviteur zélé de Mme Shizué Ogata, ange gardien de Aomamé ; Tête de moine et Queue de cheval, les sbires de la secte des Précurseurs. Tengo et Aomamé vont-ils enfin se trouver, se retrouver après vingt ans ? Pourront-ils quitter le monde parallèle de 1Q84 aux deux lunes pour retrouver le monde réel de 1984 ? Si l’atmosphère où le réel mêlé au merveilleux a de quoi vous envoûter, le style et la langue sont extrêmement agréables. Excellent moment de lecture !

samedi 21 avril 2012

LENOIR, Frédéric, CABESOS,Violette, La parole perdue, Albin Michel, 2011, 537 p.


                                 Roman mystico-historique

La recette à la mode continue à fonctionner et à plaire : prenez une intrigue basée sur un mystère, en l’occurrence la phrase qu’aurait écrite Jésus sur le sable aux pieds de la femme adultère et que seule Marie de Béthanie (Marie-Madeleine) aurait pu lire et transmettre. Ajoutez à cela un peu de mysticisme, de supranaturel, de métaphysique, de philosophie (une joute verbale entre stoïcisme et christianisme), un va-et-vient entre des lieux et des moments différents (Rome, Pompéi, Vézelay ; antiquité, XI°siècle, aujourd’hui), une intrigue policière, du passionnel, des souvenirs récurrents… et le tour est joué. La page éditoriale nous annonce un thriller éblouissant d’érudition et pourtant rien d’exceptionnel : ouvrez Wikipédia et vous retrouverez la plupart des informations historiques avancées, mais quelle horreur quand on lit à la page 427 : « … l’Enéide, de Virgile. La passion de Didon et Enée. Didon le fondateur de Rome et Enée, la reine de Carthage qui, par amour, se tue. » Sic ! Il y a de quoi bondir de son fauteuil et mettre en doute la prétendue érudition des auteurs et la crédibilité historique du récit. Dommage ! Tout le plaisir est retombé comme des petits choux quand on ouvre la porte du four avant la fin de cuisson.

lundi 16 avril 2012

HANSEN, Ron, Une irrésistible et coupable passion, Buchet Chastel, 2012, 347 p.


                Chronique judiciaire

La voluptueuse Ruth Snyder, mariée pour le pire à Albert Snyder, directeur artistique, tente de supprimer son violent et encombrant mari. Elle fait alors la connaissance de Yudd Gray, représentant en lingerie fine et, en parfaite « femme fatale », elle parvient à le subjuguer au point d’en faire son petit animal domestique. Yudd, complètement envoûté par la divine Ruth, sera le complice idéal pour éliminer le mari gênant lors d’un simulacre de cambriolage. L’intérêt de cette fiction tirée d’un fait réel qui a scandalisé les Etats-Unis en 1927 réside plus dans l’évocation des années folles et de la prohibition que dans le récit de cette relation passionnelle dans laquelle la femme offre son corps pour gagner l’amour et l’homme son amour pour jouir d’un corps. Tantôt récit, tantôt espèce de chronique judiciaire, le roman d’Hansen est plaisant sans plus.

samedi 14 avril 2012

DAMAS, Geneviève, Si tu passes la rivière, Luce Wilkin, 2011, 115 p.


                 Roman belge

François, 17 ans, est le plus jeune de la famille Sorrente et ils ne sont plus que quatre pour s’occuper de la ferme familiale dont une des limites de leurs terres est la rivière. Il y a le père, brutal, taciturne et asocial ; Jules, l’aîné, est à l’image de son père et Arthur fait les marchés et le joli cœur. L’absence de la mère est un sujet tabou et François n’en a aucun souvenir. Maryse, la seule fille, a fui en « passant la rivière » et Jean-Paul s’est tué en tombant d’un toit. Alors, François qui n’avait que du vent dans le crâne et ses cochons comme amis et confidents, va commencer à s’alphabétiser, à s’émanciper, à s’affranchir en tentant d’aller au-delà des non-dits à la recherche de ses origines. François est un personnage tendre et attachant face aux rustres de sa fratrie ; mais qui est vraiment François et qu’y a-t-il de l’autre côté de la rivière ? Premier roman court de l’auteure belge, le récit a des odeurs de terroir et de ruralité mêlées à des effluves poétiques dans un langage et un style simples et agréables qui rappellent ceux des romans de Philippe Claudel où il n’y a non plus ni lieu ni date. Un vrai plaisir de lecture !